Maître Claudette DUHAMEL comme bien d'autres femmes pour qui l'intégrité, la dignité et le sens de l'honneur tiennent une grande place dans la vie. Elle le démontre encore ici, dans une lettre qu'elle adresse à ce qui sert de président à la France. Seule petite erreur de jugement, Me Claudette croit s'adresser à un humain apte à la compréhension. Dans tous les cas, je continue à penser que notre combat n'aura de ses que si des femmes africaines et descendantes s'y impliquent avec panache, intelligence comme le démontre une fois de plus Mme Duhamel.
Claudette
DUHAMEL
Avocat
48, rue
Schœlcher
97200 -
FORT DE FRANCE
Fort
de France, le 10 septembre 2007
Monsieur Nicolas SARKOSY
Président de la République Française
Palais de l’Elysée
55 rue du Faubourg Saint Honoré
75008 PARIS.
LETTRE
OUVERTE
Objet :
votre discours à l’université Cheik Anta DIOP
Monsieur
le Président de la
République
,
Lors de
visite au Sénégal le 26 juillet 2007 vous avez prononcé un discours en
direction des peuples d’Afrique à l’Université Cheik Anta DIOP de Dakar
Vos
propos ont semble t-il choqué beaucoup d’intellectuels africains et de membres
de la diaspora noire qui ont protesté dans des articles de presse
Une
plainte a même été déposée pour propos racistes par une association laquelle a
invité les citoyens à porter plainte auprès de la gendarmerie de leur domicile.
Comme il
fallait s’y attendre vous avez répondu à ces protestations par un silence qui
ne fait que corroborer le sentiment que vous porter aux africains.
C’est
pourquoi, afin de tenter de réveiller l’humain qui est peut être encore vivant
en vous, je me contenterai de vous proposer un petit exercice amusant
consistant à mettre certains de vos propos en les adaptant au contexte bien
sur, dans la bouche d’un chef d’état africain en visite en France.
Lors de
ce discours vous avez prononcé la phrase suivante:
“Mais la
colonisation fut une grande faute qui fut payée par l’amertume et la « souffrance
de ceux qui avaient cru tout donner et qui ne comprenaient pas pourquoi on leur
en voulait autant.”
Notre
chef d’Etat africain venant sur un des hauts lieux de commémoration de la Shoah
pourrait alors dire:
« La Shoah
fut une grande faute
qui fut payée par l’amertume et la souffrance de ceux qui avait cru tout donner
pour purifier la race supérieure et qui ne comprenaient pas pourquoi on leur en
voulait autant. »
Parlant
de l’Afrique et des africains vous dites :
“Je veux, ce soir, m’adresser
à tous les Africains qui sont si différents les uns des autres, qui n ‘ont pas la même langue, qui n ‘ont pas
les mêmes coutumes, qui n ‘ont pas la même culture, qui n ‘ont pas la même
histoire et qui pourtant se reconnaissent les uns les autres comme des
Africains. Là réside le premier mystère de l’Afrique”
“Oui, je veux m
‘adresser à tous les habitants de ce continent meurtri, et, en particulier, aux
jeunes, à vous qui vous êtes tant battus les uns contre les autres et souvent
tant haïs, qui parfois vous combattez et vous haïssez encore mais qui pourtant
vous reconnaissez comme frères, frères dans la « souffrance, frères dans l’humiliation,
frères dans la révolte, frères dans l’espérance, frères dans le sentiment que vous
éprouvez d’une destinée commune, frères à travers cette foi mystérieuse qui
vous rattache à la terre africaine, foi qui se transmet de génération en
génération et que l’exil lui- même ne peut effacer.”
Que
penseriez-vous si ce même chef d’Etat africain venait dire en France:
« Je veux, ce soir,
m‘adresser à tous les Européens qui sont si différents les uns des autres, qui
n‘ont pas la même langue, qui n ‘ont pas la même religion qui n ‘ont pas les mêmes coutumes, qui
n ‘ont pas la même culture qui n ‘ont pas la même histoire ni même le même
peuplement et qui pourtant se reconnaissent aujourd’hui les uns les autres
comme des « Européens au sein d’une Union européenne par pure nécessité celle
de résister au plus fort (les USA) tout en continuant à dominer et piller le
plus faible ( l’Afrique).
“Oui, je veux m’adresser
à tous les habitants de ce continent européen et, en particulier, aux jeunes, à
vous qui vous êtes tant battus les uns contre les autres et souvent tant haïs
(dès le moyen âge occidental l’Europe a été la scène de guerres à répétition
qui ont duré des années: guerre de 100 ans! Guerre de 30 ans; guerres totales
qui ont entraîné la planète entière dans un conflit meurtrier tout simplement à
cause de l’animosité entre deux pays européens: La France et l’Allemagne!) à
vous qui malgré votre Union économique continuez de vous haïr et de vous
combattre via le territoire des autres, des plus faibles: ce tiers monde objets
de vos appétit féroces mais - qui
pourtant vous reconnaissez au sein du G8 comme frères - frères dans la domination économique, l’écrasement de l’autre partageant
tous le sentiment de « constituer une race supérieure mue par une idéologie
matérialiste qui vous amène à toujours
aller conquérir, voler, piller, gruger, tromper l’autre, idéologie que vous vous transmettez de génération
en génération et que l’exil lui-même ne peut effacer.”
Vous avez
donné aux africains le conseil suivant:
« Le problème de
l’Afrique, c’est de cesser de toujours répéter, de toujours ressasser, de se
libérer du mythe de l’éternel retour, c’est de prendre conscience que l’âge
d’or qu’elle ne cesse de regretter, ne reviendra pas « pour la raison qu’il n‘a
jamais existé”
Le chef
d’africain pourrait alors dire en toute sincérité et objectivité
« Le problème de
l’Europe c’est de cesser de toujours répéter de toujours ressasser de se
libérer du mythe de la grandeur de la civilisation gréco-romaine, c’est de prendre
conscience que l’âge d’or de la mission civilisatrice de l’Europe au travers
ses grands empires coloniaux ne reviendra pas pour la raison qu’il n’a jamais
existé, cette pseudo mission civilisatrice avait pour socle des crimes contre
l’humanité: l’esclavage, la traite négrière et la colonisation c‘est à
dire la barbarie et la négation de l’autre. »
Enfin
vous le chantre de la préférence européenne évoquant la construction de ce que
vous appelez 1’EURAFRIQUE, avez adressé ce merveilleux message aux jeunes
africains
« Jeunes d’Afrique,
ne vous coupez pas de ce qui vous enrichit, ne vous amputez pas d’une part de
vous-même. La pureté est un enfermement, la pureté est une intolérance. La
pureté est un fantasme qui conduit au fanatisme. »
Vous seriez donc en phase avec notre chef
d’Etat africain s’il s’adressait ainsi aux jeunes français.
«Jeunes de France ne
vous coupez pas de ce qui vous enrichit, ne vous amputez pas d’une part de
vous-même. La pureté est un enfermement, la pureté est une intolérance, un
fantasme qui conduit au fanatisme; rejetez la préférence européenne et
accueillez les autres les bras ouverts, acceptez chez vous la différence
africaine, arabe et asiatique ouvrez vous aux autres. »
J’espère
Monsieur le Président de la république française que ce petit exercice vous
aura permis de réfléchir sur la portée du premier article de la Déclaration Universelle
des Droits de l’Homme et du Citoyen que vos sociétés occidentales ont estimé
nécessaire et urgente de rédiger au lendemain de la seconde guerre mondiale
pour éviter que ne se perpétuent les actes de barbarie auxquels se sont livrés
les nations «civilisées» envers une catégorie d’homme blanc. J’ajouterai
que celui qui veut établir un dialogue constructif avec l’autre doit d’abord le
respecter et chercher à le connaître ce que manifestement vous n’avez pas fait.
Sinon
comment comprendre que vous vous soyez laissé aller à utiliser ce langage digne
des pires troglodytes européens du 19ème siècle à l’université portant le nom
de Cheik Anta DIOP, qui est non seulement le pionnier de la thèse scientifique
de l’Afrique berceau de l’humanité admise aujourd’hui par la communauté
scientifique, mais également le symbole fort de l’unité africaine, du pan
africanisme de 1’anti racisme ?
En ce
troisième millénaire, l’humanité a trop appris sur elle-même, sur ses origines
et son histoire, pour qu’un homme d’Etat puisse encore se permettre d’user d’un
te1 langage.
Vous
pensiez être dans la rupture, alors que vous étiez dans la réaction.
Si vous
vouliez aller de l’avant Monsieur SARKOSY il faut que vous trouviez en vous le
courage et la force de dire en Homme digne et respectueux de ses ancêtres :
HONNEUR
ET RESPECT POUR L’AFRIQUE BERCEAU L’HUMANITE.
Veuillez
agréer, Monsieur le Président de la République
française, l’assurance de ma
considération distinguée.
C.
DUHAMEL